LES DIABLOS DU BLOC-D

À Corregidor, si vous voulez être un enfoiré de dur à cuire, vous avez intérêt à être le plus gros enfoiré de tous, le plus coriace des bâtards, car ce vaisseau-mère est bourré d’enfoirés et vous pouvez être sûr que la compétition sera féroce. Mais au-delà de la simple nécessité d’être un dur à cuire pour survivre dans les rues de Corregidor, vous devrez aussi être un dur à cuire pour survivre à la Loi.  Si vous vous lancez dans une carrière criminelle et que vous vous faites pincer par le Corps des Alguaciles, ils ne vous mettront pas simplement en cellule ; cela ne fonctionne pas de cette façon à Corregidor. Si vous êtes un membre d’un gang de maras, vous aurez le choix entre rejoindre le programme des Jaguars ou sauter par un sas sans combinaison spatiale. Par contre, si vous avez commis un crime grave, vous êtes foutu, car vous n’aurez pas le choix. Les Corregidoriens ne croient pas qu’il faille subvenir aux besoins des criminels dangereux avec l’argent des impôts des citoyens Nomades qui travaillent dur. Vous serez condamné à mort, et ce rapidement, car quelques jours après votre procès, vous serez jeté hors d’un sas pour vous permettre de profiter d’une dernière sortie dans l’espace. À moins que vous ne soyez l’un des fils de pute les plus dangereux qui soient, un bâtard vraiment vicieux et violent. Dans ce cas là, vous aurez de la chance car vous ne serez pas tué, du moins pas tout de suite.

Au lieu de cela, vous serez placé au Bloc-D, là où vivent les Diablos, le bloc de ceux qui sont trop dangereux pour être placés avec le reste des détenus, et qui ne sont pas exécutés parce qu’ils pourraient encore être utiles au vaisseau-mère. Ici à Corregidor, tous les détenus sont soumis à un système de travail obligatoire, soit pour des tâches d’entretien du vaisseau-mère, soit pour servir une corporation Nomade en tant que force de travail quasi esclave. Sur ce vaisseau, tout le monde doit payer pour l’air qu’il respire, et les détenus ne font pas exception. C’est la raison pour laquelle Corregidor applique la peine de mort ; c’est un moyen de limiter le nombre de détenus à gérer, et aussi une mesure pour se débarrasser des pommes pourries. Cependant, si vous avez fait preuve d’un talent particulier pour la violence extrême et la destruction, vous pourriez être utile au Commandement Juridictionnel de Corregidor.

Techniquement, votre sort sera similaire à celui des autres détenus : vous purgerez une peine de travail forcé. Forcé parce que vous n’aurez pas d’autre choix que de le faire, à moins que vous ne vouliez risquer la peine de mort que votre séjour au Bloc-D a suspendue. Le Commandement Juridictionnel de Corregidor vous enrôlera alors dans un bataillon pénal fonctionnant comme une unité de choc en première ligne, et vous serez toujours déployé au cœur des combats. Néanmoins ce n’est pas ce qu’on appellerait une unité d’attaque suicide (quel vilain terme !), mais c’est certainement le genre d’unité qui se caractérise par un taux de mortalité très élevé. Il est donc très probable que vous rencontriez la Grande Faucheuse plus tôt que plus tard.

Face à une telle perspective, il vous viendrait peut-être à l’esprit d’essayer de vous échapper. Bonne chance. Ayant anticipé une si brillante idée, le Corps des Alguaciles vous aura probablement installé un implant de sécurité : une capsule pouvant être activée à distance pour libérer une neurotoxine dans votre système sanguin et mettre fin à votre vie en l’espace de seulement quelques secondes. Le meilleur moyen de vivre un jour de plus est donc de continuer à faire exactement ce qui vous a mis dans cette situation foireuse : être un enfoiré tellement perfide et violent, que vous survivrez à chaque mission en défonçant tous ceux qui croiseront votre chemin.

Il va sans dire que cela ne devrait pas être difficile pour vous, puisque non seulement c’était l’une de vos spécialités dans vos anciennes vies de voyou, mais qu’en plus vous serez parfaitement équipé pour cela. Tous les Diablos du Bloc-D, y compris vous-même, ont le même profil : vous avez un long passé de violence et vous avez été équipé en conséquence. Cela inclut des armures sous-cutanées bas de gamme, des greffes musculaires, des améliorations cybernétiques encombrantes mais puissantes… des trucs de gangster, essentiels pour survivre dans vos rues et pour devenir l’enfoiré dominant de votre module. Vous êtes des cyborgs durs à cuire de la rue, dotés d’une technologie laide et encombrante, mais efficace et brutale.

Cette technologie illégale avait perturbé vos esprits, déclenchant une psychopathie qui, avouons-le, a toujours existé. Vous deviez déjà être fous pour pouvoir endurer la douleur et la violence qui découlait de la vie que vous aviez choisie. C’est la raison d’être du Bloc-D et du Commandement Juridictionnel, qui a toujours quelques Diablos déployés dans les points chauds dangereux. Nous ne voulons peut-être pas de vous aux barbecues quand nous faisons la fête, ou dans les holovidéos promotionnelles, mais nous savons que vous pouvez mettre KO tous ceux qui se trouveront sur votre chemin, parce que vous êtes les enfoirés les plus coriaces du vaisseau le plus coriace de toute la Sphère Humaine. C’est pourquoi nous vous laissons vivre jusqu’à ce que l’ennemi vous tue.

Emiliano Guevara, agent Vortex et officier de la Main Noire, lors d’un entretien d’évaluation pour l’admission au Bloc-D. Module Correctionnel Supermax. Praesidio. Corregidor.

Article original de Gutier Lusqinos
https://infinitytheuniverse.com/blog/diablos-corregidor